Analyse de Mathieu Morverand, routeur de Rémy et d’Olivier Montiel.
Toute la nuit dernière, malgré la fatigue et les paupières lourdes, les yeux sont restés rivés sur les écrans pour guetter la descente de l’anticyclone sur la zone de nos marins. A l’aurore, on notait bien un léger changement mais loin de s’accorder avec les prévisions météorologiques. Ce phénomène de décalage entre les modèles proposés et la réalité en mer semble être une coutume de cette zone de convergence intertropicale particulièrement tourmentée quelques soient les couches barométriques. En de telles circonstances, l’optimisme des conseils à terre n’est plus d’aucun secours pour les rameurs. Ils n’y croient plus et ont sans doute raison. Le calvaire qu’ils endurent depuis si longtemps valide toutes leurs convictions, même traversées par les pires idées noires. C’est dans ce contexte qu’Olivier Montiel, étonnement réaliste et serein après une semaine de reculade à contre sens de l’objectif, a pris la décision d’accepter la remorque du voilier d’assistance le « Béru » . Son skipper Vianney, marin d’expérience, a désormais deux bateaux en remorque dans son sillage, Patrice Charlet (alias Mac Coy) et Olivier. Pour nos deux rameurs breton et ardéchois, ce coup de main pour s’extirper de cette zone infernale de contre- courants défavorables constitue une opportinité exceptionnelle de pouvoir sauver leur bateau. Dans le cas d’un sauvetage, seules les personnes, pas les biens, auraient été rappatriés à terre. Dans l’esprit d’un marin ayant consacré entre deux et trois ans de sa vie à concrétiser un projet et vécu plus de 71 jours dans une barcasse trempée de la proue à la poupe, c’est forcément à contre cœur que l’on abandonne une telle aventure. Mais c’est aussi une sage décision. Même si les sources météo semblent toutes s’accorder à confirmer la descente anticyclone et l’imminence de vents de Nord-Est à près de 20 nœuds, la situation n’a que trop duré et la frontière entre expérience initiatique et calvaire quotidien est désormais largement franchie. Par ailleurs, l’aide du voilier le « Béru » n’est qu’éphémère et ne vise qu’à extraire nos deux marins de ces maudits courants pour les placer dans la veine du flux sud-équatorial. Aux alentours du 4ème parallèle, la remorque sera larguée et nos deux marins devront reprendre leur navigation aux avirons vers la Guyane portés par ce flux tant convoité, le seul légitime en ces lieux à cette période. Continuer la lecture →