Analyse de Mathieu Morverand, routeur de Rémy et d’Olivier Montiel.
Sur les photos qui nous parviennent du Large de plus en plus nombreuses, on distingue un point commun : les premières tâches de rouille qui apparaissent et les couleurs des bateaux moins vives qu’au départ, comme les marques indélébiles du temps passé en mer. Pour celui qui ne découvrirait que maintenant le périple de nos rameurs sans mesurer l’impact de ces sept semaines déjà passées en mer, ces traces sont malgré tout le signe d’une aventure éprouvante tant pour le matériel que pour les femmes et les hommes qui la vivent. Ces flash visuels venus de l’océan trahissent le visage martelé et le profil amaigri de ceux que l’on va retrouver sur la ligne. A la mesure de cette longue immersion au plus profond d’eux-mêmes, confrontés à des sentiments jusqu’alors jamais explorés, il leur faudra du temps pour revenir au Monde et reconstruire leurs repères de terriens. Tous ceux qui vont les accueillir doivent s’y préparer, le mal de terre est proportionnel à la durée du voyage en mer.
Pierre Verdu qui nous envoie quotidiennement les relevés de distances ainsi que les estimations d’arrivée analyse la situation en permanence en ne s’octroyant que très peu de répit. Vivant ainsi au plus près de la réalité des rameurs, il s’inquiète de ce qui se passe autour du maelström non seulement pour ceux qui ont choisi de le contourner par le sud, mais aussi pour l’équipe du nord qui a rencontré des conditions difficiles ces dernières heures. Malgré les jours qui passent, personne n’est encore parvenu pour l’instant à franchir cette zone tourmentée malgré tous les efforts et stratégies déployés pour y parvenir. Une zone orageuse a balayé la zone d’est en ouest avec son cortège de précipitations et de vents du sud furtifs mais soutenus, obligeant plusieurs skippers à s’abriter par sécurité à l’intérieur de leur habitacle. Catherine, accompagnée par Philippe, progresse dans le sud mais à petite vitesse malgré une grande débauche d’énergie aux avirons. La route lui semble longue et compliquée même si elle n’a aucune inquiétude quant à son autonomie en vivres. Non loin d’elle, Olivier B. se montre perplexe après avoir reculé plusieurs heures vers le nord-est sans que rien, ni la houle, ni le vent ne puissent l’expliquer. Très étonnant en effet de constater une telle dérive alors que ni les vents, ni les courants visibles sur les cartes ne présentent un flux allant dans ce sens à cette position. Des micro phénomènes sont-ils possibles ? Malgré toutes les analyses, les ressources de l’océan pour nous surprendre encore et toujours restent résolument insondables.
Au nord, Harry s’est considérablement rapproché de Jean-Pierre qui garde malgré tout la tête de quelques longueurs. Moins de 10 milles les séparent et Salomé est juste là derrière en embuscade, presque à portée de voix. Il ne serait pas étonnant de voir ces trois-là franchir demain ensemble la zone de courants traversiers et foncer aussitôt après vers le courant sud-équatorial. Il n’auront plus alors qu’à viser la ligne en naviguant bord à bord sur un long sprint. Une nouvelle course commence aux portes de la Guyane. A l’arrière, la flottille s’est regroupée, Olivier M a de nouveau subi une onde de la zone intertropicale de convergence (ZIC) avec des vents établis au sud cet après-midi, suivis de périodes de calme plat presque inquiétant. Rémy vise avec la précision d’un métronome le way-point (objectif en position géographique) qui lui est communiqué. L’option Nord lui paraît la plus propice à l’inverse de Mathieu qui lui est parti pour l’option Sud. Fidèle à sa force tranquille et à son étonnante sérénité depuis le départ, il continue de savourer chaque instant de cette expérience extraordinaire et fascinante malgré toutes les difficultés rencontrées. Il pense toucher terre dans deux semaines, c’est encore long et pourtant cela lui paraît si bref. Que peuvent en effet représenter 15 jours dans le cours de l’existence ?
Rémy, je lis tous les jours les compte-rendu et suis fascinée par ton courage et ta force. Bon courage pour la suite. Je t’embrasse
Bonjour Rémy au quotidien je lis les nouvelles de bois vous êtes très courageux et bon courage pour la fin du défi à bientôt à Bonnieux bises
Du courage, Rémy, vous n’en manquez pas assurément.
Mais par ces quelques mots nous voulons simplement en augmenter la dose pour que vous puissiez disposer de réserves supplémentaires.
Avec nos meilleures et chaleureuses pensées,
Ruth et Alain